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Date: 25/07/2024

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Retraite

Retraite à 64 ans : le Nouveau Front populaire entend revenir sur la réforme Macron de 2023

Le programme du Nouveau Front populaire prévoit de revenir sur le relèvement de l’âge légal de départ en retraite issu de la loi du 14 avril 2023. Les députés La France Insoumise ont d’ores et déjà annoncé leur volonté de déposer une proposition de loi en ce sens. Mais elle devra d’abord passer l’étape de l’examen de sa recevabilité financière, avant d’être éventuellement inscrite à l’ordre du jour. À cette fin, elle est assortie d'un certain nombre de mesures sociales et fiscales.

Une proposition de loi au tout début de son parcours

La proposition de loi vise à revenir sur la réforme « Macron » entrée en vigueur en septembre 2023 et qui relève progressivement l’âge légal de départ en retraite de 62 à 64 ans, tout en accélérant le rythme de la hausse de la durée de cotisations requise pour une pension complète.

Le document que nous commentons ici est le texte d’une proposition de loi émanant des députés La France Insoumise, ainsi qu’il ressort des noms mentionnés en tête du document.

Selon les informations recueillies auprès du service presse de l’Assemblée nationale, cette proposition de loi n’avait pas encore été formellement déposée à l’heure où nous rédigions ces lignes.

Avant le dépôt officiel, et a fortiori avant son inscription à l’ordre du jour, elle doit en effet passer l’étape de l’examen de sa recevabilité financière, ainsi que l’exige l’article 40 de la Constitution. À date, le service presse de l’Assemblée nous a précisé ne disposer d’aucune information en ce qui concerne la date à laquelle cet examen interviendra.

S’agissant de son inscription à l’ordre du jour, il s’agit d’une prérogative appartenant concurremment au Gouvernement et à la Conférence des Présidents de l’Assemblée. Selon les informations du service presse de l’Assemblée, en l’état, la conférence des Présidents ne devrait pas se réunir avant septembre.

Au-delà de ces aspects juridiques, restera à voir, également, le sort réservé à ce texte compte tenu des équilibres politiques au sein de l’Assemblée nouvellement élue et de la coloration du nouveau gouvernement, lorsqu'un Premier ministre sera nommé.

À noter : selon le site Internet de l'Assemblée nationale, l’article 40 de la Constitution limite le pouvoir d’initiative des parlementaires en matière financière. Il interdit toute création ou aggravation d’une charge publique et n’autorise la diminution d’une ressource publique que dans la mesure où celle-ci est compensée par l’augmentation d’une autre ressource. Cette compensation, communément désignée sous le terme de « gage », conditionne la recevabilité de la proposition de loi.

Rétablissement de l’âge légal à 62 ans pour les générations nées à compter de 1955

L’âge légal de départ en retraite est l’âge minimal à partir duquel un assuré justifiant d’au moins un trimestre d’assurance peut demander à liquider sa pension de vieillesse (c. séc. soc. art. L. 161-17-2). En dessous de cet âge légal, il n’est en principe pas possible de prendre sa retraite, sous réserve des dispositifs permettant à certains assurés sociaux de bénéficier d’une retraite anticipée (ex. : « carrières longues »).

La réforme Macron des retraites d’avril 2023 a programmé le relèvement progressif de l’âge légal de départ en retraite de 62 ans à 64 ans (c. séc. soc. art. L. 161-17-2 et D. 161-2-1-9 ; loi 2023-270 du 14 avril 2023, JO du 15 ; décret 2023-436 du 3 juin 2023, JO du 4).

Les parlementaires proposent de rétablir l’âge légal de retraite à 62 ans pour les générations nées à compter de 1955 en revenant à la rédaction antérieure de l’article L. 161-17-2 du code de la sécurité sociale.

Abrogation de l’accélération du passage à 43 ans de durée d'assurance pour une pension à taux plein

Pour obtenir une pension de vieillesse de base à taux plein (50 %), les assurés doivent justifier, à partir de l’âge légal de départ, d’un nombre minimal de trimestres d’assurance (ou de périodes reconnues équivalentes), tous régimes confondus (c. séc. soc. art. L. 351-1 et R. 351-27).

Si l’assuré ne justifie pas du nombre de trimestres requis, le taux de la pension est affecté d’un coefficient de minoration (ou décote) (c. séc. soc. art. R. 351-27).

La durée d’assurance requise varie selon l’année de naissance de l’intéressé.

La réforme des retraites d’avril 2023 a accéléré, à compter du 1er septembre 2023, le passage à une durée de cotisations à 43 ans (ou 172 trimestres) prévu par la réforme « Touraine » de 2014. Concrètement, avec la réforme « Macron », la condition de 172 trimestres doit s’appliquer à partir des générations nées en 1965 (c. séc. soc. art. L. 161-17-3 ; loi 2023-270 du 14 avril 2023, art. 10, JO du 15).

La proposition de loi abrogerait cette mesure et reviendrait à la réforme « Touraine ». La durée de 172 trimestres ne serait requise que pour les générations nées à partir de 1973, via un relèvement davantage étalé dans le temps.

Un tableau récapitulatif en fin d'article compare le rythme du relèvement actuel issu de la réforme « Macron » avec celui de la proposition de loi.

Âge d'attribution automatique du taux plein

À partir de 67 ans, les assurés nés à partir de 1955 bénéficient d’une pension au taux plein de 50 % même s’ils n’ont pas la durée d’assurance requise (c. séc. soc. art. L. 351-8, 1°).

Cet âge du taux plein automatique serait maintenu et correspondrait ainsi au « nouvel » âge légal (62 ans) + 5 ans.

Mesures sociales et fiscales en vue de gager la recevabilité financière de la proposition de loi

Les articles 2 à 5 contiennent des propositions de mesures sociales et fiscales visant à « gager » la recevabilité financière du texte, dont l’examen est une étape préalable à son dépôt officiel et a fortiori à son inscription à l’ordre du jour (voir plus haut). Dans ce cadre, on notera en particulier les dispositions suivantes.

L’article 2 de la proposition de loi prévoit de soumettre aux cotisations du régime général :

-les revenus distribués visés aux articles 109 à 117 du CGI, les rémunérations allouées aux membres du conseil d’administration et du conseil de surveillance (CGI art. 117 bis), ainsi que les revenus de valeurs mobilières émises hors de France et revenus assimilés au sens des articles 120 à 123 bis du CGI ;

-les sommes allouées au titre de l’intéressement, de la participation ainsi que les abondements à un plan d’épargne salariale ou d’épargne retraite d’entreprise.

L’article 3 prévoit d’augmenter les taux de la cotisation d’assurance vieillesse sécurité sociale déplafonnée (celle calculée sur la totalité de la rémunération) :

-sur la part des revenus inférieurs au plafond de la sécurité sociale : 0,40 % de part salariale et 1,90 % de part patronale ;

-sur la part des revenus strictement supérieurs au plafond de la sécurité sociale : 2 % de part salariale et 3,80 % de part patronale.

À noter : par comparaison, la cotisation d’assurance vieillesse déplafonnée est actuellement de 0,40 % pour la part salariale et de 2,02 % pour la part patronale sur la totalité de la rémunération, sans distinction entre la fraction de rémunération inférieure au plafond et celle supérieure au plafond (c. séc. soc. art. D. 242-4). La part patronale a été relevée de 1,90 % à 2,02 % au 1er janvier 2024.

L'article 4 de la proposition de loi prévoit par ailleurs de rétablir l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) et de le renforcer en aménageant les règles applicables avant le 1er janvier 2018, date d‘entrée en vigueur de l’impôt sur la fortune immobilière (IFI).

Enfin, l'article 5 propose de créer taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs.

Selon l'exposé des motifs de la proposition de loi, il y aurait là des recettes supplémentaires à hauteur de plus de 10 milliards d'euros pour les mesures de l'article 2, de 4 milliards d'euros pour celles l'article 3 et de plus de 10 milliards d'euros pour celles de l'article 4 (aucun montant n'est avancé pour l'article 5). Autant de gages permettant, selon les auteurs de la proposition de loi, de compenser le retour à un âge légal de départ en retraite de 62 ans .

Nombre de trimestres requis pour le taux plein
Année de naissance
Réforme Macron
Proposition de loi (*)
1er janvier – 31 août 1961
168 trimestres
168 trimestres
1er septembre – 31 décembre 1961
169 trimestres
1962
169 trimestres
168 trimestres
1963
170 trimestres
168 trimestres
1964
171 trimestres
169 trimestres
1965 ou 1966
172 trimestres
169 trimestres
1967, 1968 ou 1969
172 trimestres
170 trimestres
1970, 1971 ou 1972
172 trimestres
171 trimestres
À partir de 1973
172 trimestres
172 trimestres
(*) Retour à la réforme « Touraine » de 2014.

Proposition de loi d’abrogation de la réforme des retraites portant l’âge légal de départ à 64 ans https://revuefiduciaire.grouperf.com/plussurlenet/complements/20240725_PPL_abro_reforme_retraites.pdf