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Date: 16/11/2023

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Social,Paye,Fiscal

Prime de partage de la valeur

Partage de la valeur : ce qui change pour la prime de partage de la valeur

Députés et sénateurs réunis en commission mixte paritaire sont parvenus, le 15 novembre 2023, à un accord sur le projet de loi relatif au partage de la valeur. Voté par le Sénat le 16 novembre, le texte sera définitivement adopté par l’Assemblée nationale le 22 novembre. Restera ensuite l’éventuel passage devant le Conseil constitutionnel, puis la publication au Journal officiel. Dans cet article, nous détaillons les améliorations apportées au régime de la prime de partage de la valeur. [NDLR 23/11/2023 : la loi a été définitivement adoptée le 22 novembre 2023. Elle entrera en vigueur après publication au Journal officiel, sous réserve d'un éventuel contrôle du Conseil constitutionnel s'il est saisi du texte]

Rappels sur la prime de partage de valeur

La prime de partage de la valeur (PPV) a pris le relais de la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat (PEPA) à l'été 2022, cette fois sous forme d’un dispositif pérenne (loi 2022-1158 du 16 août 2022, art. 1).

La PPV peut être versée par tout employeur, quelle que soit la taille de l’entreprise, pour une année donnée, s'il le souhaite.

Elle peut être attribuée à l’ensemble des salariés éligibles ou à ceux dont la rémunération ne dépasse pas un plafond déterminé par l’accord ou la décision unilatérale qui la met en place. Son montant, qui peut être modulé en fonction de certains critères, est librement fixé par l’accord ou la décision unilatérale.

La PPV bénéficie d'un régime social favorable puisque, de base, elle est exonérée de toutes les cotisations sociales d’origine légale ou conventionnelle dans la limite de 3 000 € ou 6 000 € par an et par bénéficiaire, selon la situation de l'entreprise.

À noter : la limite d’exonération est portée à 6 000 € dans quatre situations :

-l'entreprise est dotée d’un dispositif d’intéressement ;

-elle applique de façon volontaire un dispositif de participation (entreprise de moins de 50 salariés) ;

-il s’agit d’une une association ou fondation reconnue d’utilité publique ou d’intérêt général auxquelles peuvent être faits des dons ouvrant droit à réduction d’impôt ;

-dans les établissements ou services d'aide par le travail (ESAT), pour les primes versées aux travailleurs handicapés sous contrat de soutien et d’aide par le travail.

Par ailleurs, un régime renforcé d'exonération a été institué à titre temporaire jusqu'au 31 décembre 2023. Pour les salariés ayant perçu une rémunération inférieure à 3 fois le SMIC annuel au cours des 12 mois précédant le versement de la prime, en complément de l’exonération sociale de base, la PPV est également exonérée de CSG/CRDS (et donc de forfait social) et d’impôt sur le revenu.

Les améliorations apportées au régime de la PPV

Le projet de loi améliore sur plusieurs points le régime de la PPV avec :

-la possibilité pour l'employeur de verser deux primes par année civile, contre une actuellement ;

-le maintien du régime renforcé d’exonération sur 2024, 2025 et 2026 dans les entreprises de moins de 50 salariés ;

-la possibilité de placer la PPV sur un plan d’épargne salariale ou d’épargne retraite d’entreprise, et de l'exonérer ainsi d’impôt sur le revenu.

Ces nouvelles mesures sont détaillées ci-après, avec un tableau récapitulatif du régime social et fiscal de la PPV à partir de 2024.

Possibilité pour l'employeur de verser deux PPV sur une même année civile

Actuellement, l’employeur ne peut verser qu’une seule PPV par année civile, avec possibilité de fractionner ce versement dans la limite de 4 fractions (une par trimestre) (loi 2022-1158 du 16 août 2022, art. 1, IV).

Le projet de loi offre la possibilité à l’employeur de verser deux PPV au titre d’une même année civile, avec toujours la possibilité de fractionner le versement de chaque prime, dans la limite de 4 fractions (une par trimestre) (projet de loi, art. 9, 2°).

Lorsque deux primes sont versées au cours d’une même année civile, leurs montants cumulés seront exonérés dans la même limite globale de 3 000 € ou de 6 000 € par an selon le cas.

Exemple : cette mesure vise à offrir plus de souplesse aux employeurs. Une entreprise pourrait décider de verser une PPV de 1 000 € en janvier ; puis, si elle constate en septembre que sa situation économique le permet, elle peut décider de verser une nouvelle PPV de 3 000 € (étude d'impact, p. 74).

Elle entrera en vigueur dès le lendemain de la publication de la loi au JO. En cas de publication d’ici le 31 décembre 2023, les entreprises qui le souhaiteraient pourront donc verser une deuxième PPV pour l’année 2023, à condition de faire le nécessaire dans les temps (mise en place, paiement, etc.).

Maintien du régime renforcé d'exonération de 2024 à 2026 pour les entreprises de moins de 50 salariés

Compte tenu de la forte utilisation de la PPV par les entreprises de moins de 50 salariés comme outil de partage de la valeur, le régime renforcé d'exonération est reconduit pour 3 ans pour ces entreprises (projet de loi art. 9, 5°).

Ainsi, dans les entreprises de moins de 50 salariés, le régime renforcé d’exonération sociale et fiscale, donc avec exonération de cotisations sociales, de CSG/CRDS et d'impôt sur le revenu pour les PPV versées à des salariés ayant perçu moins de 3 SMIC, sera maintenu du 1er janvier 2024 au 31 décembre 2026.

Pour les entreprises de 50 salariés et plus, pas de changement : le régime renforcé d'exonération prendra fin le 31 décembre 2023 (loi 2022-1158 du 16 août 2022, art. 1, VI). Restera donc l’exonération sociale « de base » attachée à la PPV.

Lorsque l'exonération d'impôt sur le revenu n'est pas applicable, les salariés pourront néanmoins « exonérer » d'impôt sur le revenu leur PPV en l'affectant sur un plan d'épargne salariale ou un plan d'épargne retraite d'entreprise (voir ci-après).

Le tableau ci-dessous récapitule le régime de la PPV à partir de 2024.

Régime social et fiscal de la PPV à partir de 2024
Primes versées du 1.01.2024 au 31.12.2026
Primes versées à partir de 2027 (quel que soit le niveau de salaire)
Salaire < 3 SMIC
Salaire ≥ 3 SMIC
Cotisations sociales (1)
Exonération dans la limite de 3 000 € ou 6 000 € (2)
CSG/CRDS, taxe sur les salaires (3)
Entreprises < 50 salariés
Exonération dans la limite de 3 000 € ou 6 000 € (2)
Dues (4)
Dues (4)
Entreprises ≥ 50 salariés
Dues (4)
Forfait social
• NON pour les entreprises de moins de 250 salariés (5)
• OUI pour les entreprises de 250 salariés et plus (5), sur la fraction exonérée de cotisations mais soumise à CSG
Impôt sur le revenu
Entreprises < 50 salariés
Exonération à hauteur de 3 000 € ou 6 000 € (2), même si la prime n'est pas affectée sur un plan d'épargne (6)
• Imposable en principe
• Exonération dans la limite de 3 000 € ou 6 000 € (2) en cas d’affectation sur un plan d'épargne (6)
Quel que soit l'effectif :

-imposable en principe ;

-exonération dans la limite de 3 000 € ou 6 000 € (2) en cas d’affectation sur un plan d'épargne (6)

Entreprises ≥ 50 salariés
• Imposable en principe
• Exonération dans la limite de 3 000 € ou 6 000 € (2) en cas d’affectation sur un plan d'épargne (6)
(1) Cotisations sociales d’origine légale ou conventionnelle (parts salariales et patronales), contribution formation, taxe d’apprentissage et participation construction.
(2) Par an et par bénéficiaire. 6 000 € dans certaines entreprises.
(3) Taxe sur les salaires uniquement pour les employeurs concernés.
(4) Après abattement d’assiette de 1,75 % pour la CSG/CRDS.
(5) Même condition d’effectif que pour l’application du forfait social à l’intéressement.
(6) Plan d'épargne salariale (PEE, PEI) ou d'épargne retraite d'entreprise (PERCO, PERCO-I, PERE-CO PERE-CO-I ou PERE-OB). Exonération d’IR subordonnée à l'affectation au plan d'épargne dans le délai à fixer par décret et au respect de la durée d’indisponibilité associée au plan d’épargne, sous réserve des cas de déblocage autorisés.

Affectation de la PPV sur un plan d'épargne et exonération d'impôt sur le revenu associée

Actuellement, une PPV qui n'ouvre pas droit à l'exonération d'impôt sur le revenu ne peut pas être défiscalisée par un autre biais.

Le projet de loi permet aux salariés de placer tout ou partie de la PPV sur un des plans d’épargne suivants, lorsqu'ils ont adhéré à un tel plan :

-plan d'épargne d'entreprise ou interentreprises (PEE, PEI) ;

-plan d'épargne retraite collectif « ancienne mouture » (PERCO, le cas échéant interentreprises) pour les entreprises dans lesquelles de tels plans sont encore actifs ;

-plan d'épargne retraite d'entreprise collectif (PERE-CO, le cas échéant interentreprises) ou plan d'épargne retraite d'entreprise obligatoire (PERE-OB).

Les salariés pourront ainsi bénéficier de l’exonération de l’impôt sur le revenu pour les sommes bloquées, dans la limite du plafond de 3 000 € ou de 6 000 € par an et par bénéficiaire (projet de loi, art. 9, 5°).

Le salarié devra procéder à l'affectation de la PPV dans un délai à fixer par décret. Une fois les sommes placées, il faudra également respecter la durée d'indisponibilité, hors cas de déblocage anticipé associés au plan d'épargne concerné.

L’employeur sera tenu d'informer le salarié des sommes attribuées au titre de la ou des PPV et du délai dans lequel il peut formuler sa demande d’affectation au plan d’épargne.

En outre, les employeurs sont autorisés à abonder les PPV affectées sur un plan d'épargne, si cet abondement est prévu par le règlement du plan et dans les limites générales d'abondement prévues par le code du travail (projet de loi, art. 11).

Partage de la valeur : les autres volets du projet de loi
En plus de ce volet relatif à la prime de partage de la valeur, le projet de loi comprend :

-un volet relatif aux nouvelles obligations de partage de la valeur des entreprises en cas de bénéfice, à lire dans notre article « Partage de la valeur : de nouvelles obligations pour les entreprises réalisant un certain niveau de bénéfice » ;

-un volet relatif à la création d'un plan de partage de la valorisation de l’entreprise, à lire dans notre article « Partage de la valeur : un nouveau dispositif, le plan de partage de la valorisation de l’entreprise » ;

-un volet relatif aux mesures destinées à compléter, simplifier et rendre plus attractifs les mécanismes d'épargne salariale, à lire dans notre article « Partage de la valeur : les divers aménagements apportés à la participation, à l’intéressement et aux plans d’épargne ».

Projet de loi portant transposition de l’accord national interprofessionnel relatif au partage de la valeur au sein de l’entreprise, texte définitif 22 novembre 2023 ; https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/textes/l16t0187_texte-adopte-provisoire.pdf