Date: 03/10/2025 |
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Fiscal
Contentieux
Le schéma portage salarial visant à éviter l'impôt en France vient s'ajouter à la « carte des montages frauduleux »
L'administration fiscale a récemment intégré dans sa carte des pratiques et montages abusifs un schéma qu'elle considère comme abusif. Ce montage n'est pas nouveau et consiste à mettre en place un portage salarial via une société étrangère afin éluder l’impôt sur le revenu en France.
En principe, toute personne physique qui réside en France y est redevable de l’impôt sur le revenu au titre de l’ensemble des revenus et des gains qu’elle perçoit.
Qualifié de dispositif « anti-abus », l’article 155 A, I du CGI permet de contrer la pratique consistant, pour un contribuable résident de France, à éluder l’impôt français par l’interposition d’une société domiciliée dans un État étranger qui perçoit la rémunération des services rendus par ce contribuable, que ces services soient rendus en France ou ailleurs.
Exemple :
Monsieur G, résident de France, exerce une activité libérale de consultant informatique, imposable à l’impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices non commerciaux. Il a une clientèle d’entreprises françaises qui lui règle les honoraires qu’il leur facture directement.
Il décide d’abandonner son statut d’indépendant pour devenir employé salarié d’une société étrangère qui propose des services informatiques (la société F). Sa clientèle située en France doit désormais conclure un contrat de sous-traitance préalable avec la société F, qui se charge de facturer les prestations et à laquelle sont réglés les honoraires de sous-traitance. En contrepartie des prestations réalisées chez les clients, Monsieur G est rémunéré par des salaires versés par la société F.
En réalité, la société F est une entreprise dépourvue d’activité économique ou qui n’assure que des fonctions de routine (émission des factures, gestion administrative des consultants...). Les honoraires qu’elle facture aux clients français ne trouvent aucune contrepartie réelle dans une intervention propre de la société F et sont exclusivement destinés à rémunérer les prestations de services réalisées par Monsieur G.
Au plan fiscal, ces salaires sont déclarés en France par Monsieur G comme des revenus de source étrangère lui ouvrant droit à un crédit d’impôt destiné à compenser une double imposition de revenus à l’étranger et en France.
Ainsi, par l’interposition de la société F, Monsieur G dissimule sa qualité de prestataire réel et de bénéficiaire effectif des sommes versées par les clients, ce qui lui permet de se soustraire à l’imposition de ces revenus professionnels liés à une activité pourtant exercée en France. De surcroît, alors qu’il n’acquitte aucun impôt au titre de ces revenus à l’étranger, Monsieur G obtient un crédit d’impôt indu.
Sur le plan social, ce montage peut également permettre à Monsieur G d’éluder les contributions et cotisations sociales dues au titre d’une activité indépendante, tout en bénéficiant de prestations sociales en France. En effet, sa démission ou son licenciement par la société F, suivie d’une embauche par une société française, même sur une très courte période, lui permet ensuite de prétendre à des allocations chômage en tenant compte de la durée de son activité exercée via la société F.
Les rehaussements
En application de l’article 155 A du CGI, les sommes perçues par ces sociétés étrangères interposées en rémunération des prestations sont imposées au nom des consultants, comme si ces sociétés n’avaient jamais existé.
Dès lors que les consultants sont réputés exercer leur activité en dehors de tout lien de subordination avec les clients, les sommes sont imposées à l’IR dans la catégorie des BNC. Ces sommes étant la contrepartie de prestations réalisées par un résident de France à destination de clients situés en France, elles sont en tout état de cause uniquement imposables en France.
Les rappels d’impôt sur le revenu et la reprise des crédits d’impôt indus effectués par l’administration fiscale sont assortis de l’intérêt de retard et d’une majoration de 80 % pour manœuvres frauduleuses, sans préjudice de la qualification pénale des faits.
Les sociétés clientes qui acceptent sciemment les factures de complaisance émises par les sociétés étrangères encourent l’application d’une amende de 50 % des montants facturés (CGI art. 1737, I).
L’administration fiscale signale ce type de montage et les personnes impliquées aux administrations partenaires de la sphère sociale.
Pour aller plus loin :
- voir « Dictionnaire fiscal », 2025, § 58275
https://www.economie.gouv.fr/dgfip/carte-des-pratiques-et-montages-abusifs